Titre : | Demi-consciences et double consciences : un parcours historique (2015) |
Auteurs : | CARROY JACQUELINE |
Type de document : | Article |
Dans : | EVOLUTION PSYCHIATRIQUE (1 vol 80, 2015) |
Article en page(s) : | 41-53 |
Note générale : | Bibliogr. |
Descripteurs |
[SANTEPSY] 19E SIECLE [SANTEPSY] CANNABIS [SANTEPSY] CONSCIENCE [SANTEPSY] EXPERIENCE [SANTEPSY] HISTOIRE DES SCIENCES [SANTEPSY] HISTORIQUE [SANTEPSY] INCONSCIENT [SANTEPSY] OBSERVATION [SANTEPSY] REVE [SANTEPSY] SOMMEIL |
Mots-clés libres: | FRANCE ; MAURY ALFRED ; MOREAU DE TOURS JJ |
Résumé : | Objectifs : Ce travail propose l'étude des descriptions des phénomènes de demi-conscience ou de double conscience au dix-neuvième siècle en France, et l'analyse des enjeux épistémologiques et anthropologiques qui les traversent. Méthode : Une reprise de la littérature de l'époque contient plusieurs types de descriptions : des auto-observations, telles celles de Jacques Joseph Moreau de Tours expérimentant les effets du haschich sur lui-même pour en faire le récit, se dédoublant ainsi car décrivant consciemment la modification de sa conscience. D'autres, tel Maury, étudient leurs rêves en se faisant aider par des tiers qui doivent les réveiller en plein sommeil, ou bien cherchent à influencer leurs rêves par des odeurs ou des sons. D'autres descriptions portent enfin sur l'observation de modifications d'états de conscience chez autrui (Azam décrivant la double personnalité de Félida). Résultats : Moreau de Tours décrit l'auto-observation d'une manie 'expérimentale' sous haschich, manie partiellement consciente d'elle-même. La 'désagrégation' de sa conscience lui permet de dire que certains aliénés sont capables, sans recours au haschich, de s'auto-observer d'une même façon (une partie 'saine' observant la partie 'malade'). Richet poursuit les travaux de son maître et oppose des 'facultés volontaires' à des 'facultés inconscientes'. Maury étudie, quant à lui, ses propres productions hypnagogiques, ou 'rêvasseries' pour considérer le rêve comme analogue à l'hallucination et au délire, et décrit des automatismes cérébraux irrépressibles. Il évoque également des instincts, refoulés par la volonté pendant les phases de veille, lesquels réapparaîtraient dans les phases de rêve. Hervey de Saint-Denys, quant à lui, privilégie ses propres rêves accompagnés de la conscience de rêver. Il décrit comment, au cours même de son rêve, il peut être capable de le diriger et, par exemple, de reproduire le même rêve, par retour en arrière, alors même qu'il dort. Discussion : Les études sur les modifications de la conscience posent de multiples questions et suscitent de nombreux débats au 19e siècle. Tout d'abord, elles ouvrent sur deux conceptions opposées de l'individu. Une première, celle de l'école spiritualiste 'cousinienne' postule l'unicité et l'identité du moi, tandis que l'autre, de Cabanis à Maury et Taine, pour simplifier, met l'accent sur l'auto-observation et l'observation d'états de demi-consciences et de doubles consciences. La question est également posée, notamment par Maury, du statut des connaissances du rêveur et de la mémoire qui se développe dans le sommeil. Maury soutient qu'un savoir oublié à l'état de veille pourrait être rappelé en rêve. Conclusion : Les phénomènes de demi-conscience et de double conscience interrogent l'identité même du sujet et font entrevoir la possibilité qu'il existe des savoirs oniriques insus (ou inconscients) à l'état de veille. Cela amène Taine à soutenir en 1870 une philosophie selon laquelle le moi n'est, somme toute, qu'une pluralité d'états de conscience et qu'il n'a ni identité, ni unicité. Arthur Rimbaud, peut-être après avoir lu Taine, affirme de même en 1871 'Je est un autre'.[Résumé d'auteur] |
En ligne : | http://www.em-premium.com/article/954985 |